Masturbation et confinement J 23
CONFINEMENT : J 23
Préserver notre santé mentale
L’autoérotisme
est un des grands vainqueurs du confinement.
La jouissance de l’idiot, comme était nommée la masturbation, est à la mode. Elle
était aussi autrefois accusée de rendre sourd. Considérée comme un vice et
surtout déclinée au masculin la branlette
n’avait rien de flatteur.
Les féministes ont cherché à ce que les femmes s’approprient
leur plaisir et ne le laissent pas entre les seules mains des hommes. « Notre
corps, nous-mêmes » paru en 1973 aux Etats-Unis (réédité très récemment)
est un des plus grands classiques internationaux du féminisme. Elles ont participé à ce que la masturbation soit
réhabilitée. Comment le corps féminin fonctionne-t-il ? Le sexe des femmes
est mal connu, peu décrit, les livres de SVT ne mentionnent pas tous le clitoris
à ce jour (voir les travaux d’Odile Fillod, écouter le site audio porno VOXXX…)
La masturbation passe de substitut honteux à pratique solitaire ou partagée,
conseillée par les sexologues pour guérir divers troubles.
Ce qui tombe bien pour les confinés esseulés. C’est le
printemps de la libido pour tous.
Les psychanalystes ont bien sûr de l’eau à apporter au moulin.
Je cite Sigmund Freud (1899) : « Parmi les couches
sexuelles, la plus profonde est celle de l’autoérotisme (…) Plus tard l’alloérotisme
(homo- ou hétéro-) s’y substitue, mais il continue certainement à subsister
sous la forme d’un courant indépendant ». (Ouvrons une parenthèse : ni
la masturbation ni l’homosexualité n’y sont considérées comme des déviances par
le père fondateur de la psychanalyse. Cette parenthèse remet un peu les
pendules à l’heure pour certains détracteurs de mauvaise foi ou ignares.)
L’autoérotisme est premier et jamais il ne disparaît au cours
de la vie adulte.
Freud, cette fois en 1905 dans les Trois essais sur la
théorie sexuelle, situe la succion comme activité fondatrice :
« Nous dirons que les lèvres de l’enfant ont joué le rôle de zone
érogène et que l’excitation causée par l’afflux de lait chaud a provoqué le plaisir.
Au début, la satisfaction de la zone érogène fut étroitement liée à l’apaisement
de la faim. »
La sexualité se développe en s’étayant sur une fonction
essentielle à la vie dont elle se détache (Autre parenthèse : les symptômes
liés à l’oralité attestent que ce détachement se fait plus ou moins. Le
substitut de satisfactions sexuelles peut -psychiquement, de l’intérieur- s’imposer
excessivement ou le désir peut tenter d’être effacé à l’inverse). La bouche reste
une zone érogène de tout premier plan.
La première satisfaction érotique est liée au sein qui donne
le lait, l’amour ressenti pour la mère le donnant en est un autre aspect.
La satisfaction autoérotique des pulsions partielles
localisées s’organise peu à peu… mais ça, c’est une autre histoire.
Ne pas céder sur son désir
Avec cette célèbre formule Lacan invite à ne pas en rester au
culte des plaisirs. Il ne propose pas de développer un érotisme raffiné ou de
céder aux plaisirs artificiels (grand bien vous fasse…). Cultiver le désir n’a
aucun sens si c’est une nouvelle injonction, si ça consiste à se duper soi-même
ou frimer.
Reconnaître son désir, l’assumer et s’affranchir de ce qui
empêche de le réaliser, lutter pour le rendre réalisable, concerne et dépasse
évidemment la sexualité.
S’affronter à la réalisation de son désir profond et
peut-être aussi à la déception de constater que ce n’est que ça, à la
place de refouler, c’est vraiment se risquer.
Les palliatifs ne sauraient suffire à qui veut un jour sortir
réellement du confinement. En sortir dépasse le seul fait de franchir sa porte.
Mieux, ça peut démarrer confinés puisqu'il s’agit de prendre au sérieux
ses désirs profonds.
A demain…
Masturbation et confinement J 23
Reviewed by grangeard
on
avril 08, 2020
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