Le désir, le plaisir et le déconfinement J 52


CONFINEMENT : J 52

Préserver notre santé mentale


Le désir à la veille du déconfinement


Hier c’était la St Prudence ; joli prénom et jolie qualité.
Demain, c’est la St Désiré. Magnifique !
Aujourd’hui, Carpe diem…

Parlons un peu désir, ce n’est jamais inutile. Pour commencer, le désir n’est pas à confondre avec la demande. Le plaisir en est très différent. Obtenir ce que l’on veut parce que quelqu’un cède à la demande n’a pas la saveur de déceler le désir de l’autre derrière une décision qui lui appartient.

Même s’il est imprudent dans un court billet de s’exprimer sur un tel propos en en sachant la complexité, la véritable prudence sera de préciser d’emblée qu’il s’agit de cheminements. Sans attendre l’aboutissement définitif d’une pensée pour la partager, on peut choisir d’élaborer et y travailler ensemble, comme ces co-constructions que l’on réalise lors d’une psychanalyse. Freud a assuré que le but d’une psychanalyse est de pouvoir aimer et travailler.

En amour, n’est-on pas toujours présomptueux, par définition ? Se positionner en objet d’amour relève d’un sacré challenge, bien imprudent. L’amour ose !
Durant ce confinement, une très grande différence s’est exprimée entre les personnes se trouvant bien avec celles avec qui elles étaient assignées à résidence et celles qui rêvaient de passer leur temps avec d’autres ; les personnes seules physiquement mais reliées à d’autres psychiquement ; bref, celles qui étaient soutenues par un désir et les autres…
Le désir s’est confirmé comme un moteur d’épanouissement.

Les Confinés désirants séparés depuis des semaines, contraints au nom de la Loi à ne pas se retrouver, sont nombreux à compter les jours. Enfin, pour les plus chanceux, ceux qui connaissent la date des retrouvailles…
Se mesure dans le manque ce qui est essentiel ou superflu. Le confinement en a éclairé plus d’un. Il y a évidemment des gens plus doués que d’autres pour les prises de conscience et surtout savoir en faire quelque chose, traiter ce qu’elles apportent.

Le besoin de l’autre n’a rien à voir au désir, il est du ressort de la dépendance. Pour rester sujets dans le désir, la relation égalitaire sert de garant. Le bébé est dans le besoin, l’adulte peut grandir. Il vérifie alors que c’est moins terrible que ce qu’il imaginait. Et les avantages sont surprenants…
Dans le besoin, il y a une notion d’assujettissement qui n’augure rien de bon à terme. On glisse vers l’aliénation. Rien de bien attirant… Un abus de pouvoir risquerait d’être posé par celui qui n’est pas dans le besoin et qui soumettrait. Une terreur interne peut aussi stopper l’élan.
Ce n’est pas l’amour qui soit dangereux ! Tout dépend entre qui et qui le lien se tisse.  C’est comme pour le rire. On peut rire de tout mais pas avec n’importe qui !

Enfin, le désir ne vient pas de nulle part, il résulte de la rencontre de deux êtres, mais pas seulement. Il est préexistant. Bien sûr il commence dans la toute petite enfance, il est même à l’origine de la vie. Être désiré n’est cependant pas toujours certain.

Se protéger et passer à côté de sa vie est une défense comme sacrifier son désir par peur de s’y risquer. La panique du vacillement est compréhensible. On la comprend et elle se comprend. Pourtant la vie mérite d’être vécue. Qu’elle soit bien ou mal vécue, elle est dangereuse… L’altérité ramène à la réalité. L’ouverture à l’autre, l’amour rendent heureux. Et parfois malheureux aussi, qui peut le nier ?

Le désir à l’heure du déconfinement


Pour les non confinés ensemble, l’échange bien réel est par définition resté virtuel durant des semaines. Le corps était présent dans les messages. Et voilà qu’enfin, le langage du corps pourra s’exprimer directement, sans barrières. Les amoureux franchiront le pas de la distanciation. Ce sera une nouvelle première fois.

Cette expérience originale soude certains et éloigne d’autres. Le confinement est ramené à une situation qui s’intègre à toutes les autres. Et c’est bien ! Ainsi son caractère hors-norme s’amoindrit, il est plus facile de penser ce qu’il va produire.

Pour les amants non confinés ensemble, ces mois font partie de leur histoire exactement au même titre que d’autres moments de leur vie. Construit à deux, comme le reste de leur vécu, c’est un temps partagé. Comme pour les personnes ayant été ensemble finalement…

La proximité s’affranchit de l’espace. Ce qui rend dingues les jaloux, jusqu’à des extrémités dangereuses, malheureusement pathologiques. Les relations d’égalité, de partenariat relèvent d’un autre niveau, plus avisé que celles de dominant-dominé. La qualité est le garant de la longévité du lien, quel qu’il soit. Rompre un lien qui fait du bien n’a pas de sens. Le désir ne s’étiole avec le temps que s’il est mal établi. Voilà pourquoi désirer est un cheminement vivifiant, un processus évolutif.

Le confinement a été vécu différemment par les confinés séparés mais ensemble télépathiquement (ou quasi…) parce que la solitude n’a pas les mêmes connotations. L’importance de ce qui se transfère du passé sur les relations actuelles profite de moments comme celui qui vient d’être traversé. La peur de l’abandon a été particulièrement réactivée pour ces confinés dont les mots pour les dire manquent !

Refuser ou désirer le désir reste une question qui repose sur bien plus que des circonstances. Certains sont plus frileux. Chat échaudé craint l’eau froide dit-on. D’ailleurs le chat craindra l’eau chaude aussi. Il n’aime pas l’eau du tout. La confiance trompée s’inscrit durablement. L’être humain lui ressemble. Certaines rencontres ont du mal à s’épanouir davantage en raison du passé que du présent, d’un passé qui ne concerne pas que ces deux partenaires-là (nous en avons déjà parlé précédemment).
Il est impossible de penser au déconfinement sans se représenter les amoureux qui attendent depuis des semaines le moment où ils vont se retrouver. Rallumer le désir réveille les endormis et sèche les larmes. Il reste à chacun de décider si ce jeu-là en vaut la chandelle.


A demain…


Trois allumettes une à une allumées dans la nuit
La première pour voir ton visage tout entier
La seconde pour voir tes yeux
La dernière pour voir ta bouche
Et l'obscurité tout entière pour me rappeler tout cela
En te serrant dans mes bras

Jacques Prévert

Le désir, le plaisir et le déconfinement J 52 Le désir, le plaisir et le déconfinement    J 52 Reviewed by grangeard on mai 07, 2020 Rating: 5

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